Le Polyamour

Polyamour : Explorer un Modèle Relationnel Éthique et Consensuel

Le polyamour, une approche des relations multiples où chaque personne est impliquée dans des relations amoureuses consensuelles et transparentes, se distingue par ses valeurs de communication et d’éthique. Dans cet article, nous examinerons le polyamour à travers la recherche scientifique, en abordant sa définition, ses différentes configurations, son historique, ainsi que les défis et opportunités qu’il présente pour les individus.

Définition et Principes du Polyamour

Dans les milieux académiques, le polyamour est souvent défini comme une « relation non monogame consensuelle » (CNM), un terme qui inclut diverses formes de relations consensuelles non-exclusives. Une étude de Rubel et Bogaert (2015) indique que ces relations se fondent sur des valeurs de transparence et de respect mutuel, impliquant des relations multiples où le consentement de chaque partenaire est explicitement recherché.

Une Brève Histoire du Polyamour

Le concept de polyamour, bien que formellement développé au XXe siècle, puise ses racines dans des pratiques culturelles anciennes et variées. Par exemple, Sheff (2016) examine les structures relationnelles non monogames dans des cultures indigènes et dans l’histoire ancienne, où l’amour multiple n’était ni stigmatisé ni réduit à une pratique clandestine. Les structures de familles étendues et de multiples relations étaient communes et faisaient souvent partie de l’organisation sociale. Les années 1960-1970 marquent un tournant, avec l’émergence de la contre-culture et la révolution sexuelle, période durant laquelle la non-monogamie et le polyamour se sont imposés comme des alternatives aux structures relationnelles traditionnelles. Depuis, le polyamour s’est enrichi en se nourrissant de théories modernes sur le développement personnel, la psychologie positive et la liberté individuelle.

Prévalence du Polyamour

La prévalence du polyamour varie selon les études et les contextes culturels. Conley et al. (2017) estiment qu’environ 4 à 5 % des adultes aux États-Unis pratiquent une forme de relation non monogame consensuelle, et jusqu’à 20 % déclarent avoir envisagé ce modèle à un moment de leur vie. Dans la culture populaire, la visibilité de figures médiatiques et d’auteurs prônant la non-monogamie consensuelle a contribué à démystifier cette approche. Cependant, la recherche montre que la stigmatisation persiste, avec des préjugés souvent associés au manque de fidélité ou d’engagement, bien que ces idées soient basées sur des normes monogames et non sur des preuves scientifiques.

Configurations et Types de Relations Polyamoureuses

Les relations polyamoureuses sont diverses et flexibles, ce qui permet aux personnes d’adapter leur configuration relationnelle à leurs besoins émotionnels et pratiques. Klesse (2014) documente des configurations comme les triades (trois personnes formant un couple à trois), les quatuors (quatre personnes en relation interconnectée), et les polycules, des réseaux relationnels impliquant plusieurs personnes dans des liens variés et interconnectés. Une configuration populaire est celle du « solo polyamour », où chaque partenaire maintient son indépendance sans fusionner ou cohabiter, ce qui correspond souvent à des personnes pour qui l’autonomie est primordiale. Des variantes de ces configurations continuent d’émerger, soulignant que le polyamour n’est pas une structure figée mais un modèle relationnel en évolution.

Valeurs Fondamentales : Communication, Compersion, et Consentement

L’un des aspects essentiels du polyamour est la communication ouverte. Une recherche de Balzarini et al. (2017) souligne que les polyamoureuses et polyamoureux investissent davantage dans la communication et la résolution des conflits, ce qui peut réduire les tensions et favoriser un climat de confiance. Un autre concept central est la « compersion », souvent définie comme la joie ressentie en voyant son partenaire s’épanouir avec un autre, ce qui contraste avec la jalousie habituellement présente dans des relations monogames.

Les Défis de la Jalousie et du Consentement Éclairé

Les relations polyamoureuses, bien qu’axées sur le consentement et la transparence, peuvent susciter des défis émotionnels, comme la jalousie. Moors et al. (2015) rappellent que la gestion de la jalousie dans le polyamour n’est pas une simple question de suppression de cette émotion, mais plutôt une invitation à l’analyser et à la comprendre. La jalousie peut ainsi devenir un chemin vers une meilleure connaissance de soi et une plus grande résilience émotionnelle. Le consentement éclairé joue également un rôle central dans la stabilité des relations polyamoureuses, en garantissant que chaque partenaire soit informé et en sécurité dans la relation.

S’ouvrir au Polyamour : Processus et Développement Personnel

L’ouverture au polyamour demande une capacité de réflexion et un engagement dans le développement personnel. Miller et al. (2018) montrent que les personnes polyamoureuses travaillent souvent sur leurs compétences émotionnelles et leur intelligence relationnelle, renforçant ainsi leur capacité à comprendre et gérer leurs émotions.

Perceptions Culturelles et Juridiques

La perception du polyamour varie selon les contextes culturels et juridiques. Dans des pays comme le Canada ou certaines régions d’Europe, la non-monogamie consensuelle est généralement mieux acceptée, tandis que dans d’autres contextes, elle demeure marginalisée. Brewster et Baldwin (2019) montrent que l’absence de protection légale pour les familles polyamoureuses crée des vulnérabilités, en particulier en matière de parentalité et de succession. Cette lacune souligne la nécessité d’une reconnaissance plus large des relations polyamoureuses pour garantir l’égalité de traitement de ces familles.

Sources

1. Balzarini, R. N., Dharma, C., Kohut, T., & Campbell, L. (2017). Is polyamory associated with stigma? A qualitative exploration of perceptions of nonmonogamy. Journal of Sex Research, 54(4-5), 574-587. doi:10.1080/00224499.2016.1269309

2. Brewster, M. E., & Baldwin, A. (2019). A qualitative study of polyamory: Exploring experiences of relational health and social acceptance. Journal of Marital and Family Therapy, 45(1), 89-105. doi:10.1111/jmft.12317

3. Conley, T. D., Matsick, J. L., Moors, A. C., & Ziegler, A. (2017). Investigation of consensually nonmonogamous relationships: The roles of identity factors and stigmatization. Journal of Sex Research, 54(4-5), 537-543. doi:10.1080/00224499.2016.1158181

4. Klesse, C. (2014). Polyamory: Intimate practice, identity, or sexual orientation? Sexualities, 17(1-2), 81-99. doi:10.1177/1363460713511096

5. Miller, R. M., & Manley, M. J. (2018). Polyamory as a cultural identity: New discourse for non-monogamous relationships in a changing society. Culture, Health & Sexuality, 20(9), 1064-1078. doi:10.1080/13691058.2017.1417493

6. Moors, A. C., Matsick, J. L., Ziegler, A., Rubin, J. D., & Conley, T. D. (2015). Stigma toward individuals engaged in consensual non-monogamy: Robust and worthy of additional scholarly attention. Journal of Sex Research, 52(3), 343-352. doi:10.1080/00224499.2014.970322

7. Rubel, A. N., & Bogaert, A. F. (2015). Consensual nonmonogamy: Psychological well-being and relationship quality correlates. Journal of Social and Personal Relationships, 32(5), 688-711. doi:10.1177/0265407514541074

8. Sheff, E. (2016). The polyamorists next door: Inside multiple-partner relationships and families. Rowman & Littlefield Publishers.

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